Association Cniid - Centre national d’information indépendante sur les déchets - http://cniid.fr

logo du site Accroche
français français
    FaceBook RSS Ver Youtube   
Newsletter Articles Mailing

Déchets et énergies renouvelables : Observ’ER voit flou !
Partager cette page


Le 1er mars 2012,

Observ’ER, l’observatoire des énergies renouvelables, vient de publier son baromètre des énergies renouvelables pour 2011 [1], qui évalue les avancées de la France en matière de développement des énergies renouvelables. Le moins que l’on puisse dire c’est que, lorsqu’il s’agit d’aborder la question de l’énergie issue des déchets, ses observations sont plutôt troubles, voire troublantes.

Des populations locales rétrogrades et le choix du recyclage à l’origine de la morosité du secteur de l’incinération

Sur l’incinération d’abord, Observ’ER pointe d’un doigt accusateur [2] le choix de la France de « réduire les volumes de déchets incinérés au profit du recyclage » et le « refus des populations locales » devant les nouveaux projets d’incinérateur, qui rendent le marché de l’incinération « morose ». Le Grenelle est ainsi mis en cause, mais pas un mot sur le bien fondé de ces décisions et sur le fait qu’elles ont été consacrées au niveau européen par la hiérarchie des déchets adoptées en 2008 [3].

L’observatoire déplore ensuite que le tarif de rachat de l’électricité issue de l’incinération reste « modeste par rapport à d’autres filières renouvelables ». Là encore, Observ’ER ne va pas bien loin dans la réflexion, considérant que l’électricité issue de l’incinération est renouvelable au même titre que l’éolien ou le solaire. Faut-il encore rappeler qu’une énergie qui émet 10 millions de tonnes de CO2 chaque année en France et qui n’est considérée comme renouvelable que parce qu’elle brûle des biodéchets au mépris de la hiérarchie européenne des déchets - qui préconise de les composter et/ou les méthaniser -, est tout sauf « verte ».

Sur la rentabilité des installations, Observ’ER met également en cause les populations locales, dont le refus de voir s’implanter des incinérateurs dans des zones très peuplées supprime les débouchés pour la chaleur issue de l’incinération, obligeant les industriels à se rabattre sur la production d’électricité bien moins rentable. Ce qu’Obser’vER semble oublier, c’est que c’est aussi et surtout la volonté d’implanter des usines partout sur le territoire qui pose problème. Les populations ne sont pas responsables de cet état de fait. Pour rappel, un quart des incinérateurs européens sont en France.

Mais pourquoi tant de haine de la part des populations locales ? Pour Observ’ER [4], elles seraient restées focalisées sur les risques sanitaires mis en lumière par les scandales des contaminations à la dioxine dans les années 1990. C’est accorder bien peu de crédit à l’action locale qui voit fleurir des démarches de plus en plus complètes, pour une meilleure gestion des déchets, basées sur une réelle prise de conscience de la raréfaction des ressources naturelles et du réchauffement climatique, et pas seulement sur des peurs vieilles de 20 ans. Mais Observ’ER tente tout de même la parade tant usitée du « rapport InVS » qui conclurait selon lui « à l’absence de risques de cancers liés aux rejets atmosphériques pour les riverains des UIOM actuellement en fonctionnement ». On peut déplorer qu’une fois de plus une instance dite « officielle » se soit contentée de lire les premières pages du rapport et non le rapport dans son intégralité. S’ils l’avaient fait, les rédacteurs du rapport d’Observ’ER auraient pu lire que certes les risques des anciennes usines ne peuvent être extrapolés à ceux des incinérateurs de nouvelle génération, mais que « l’éventualité d’un risque en excès en lien avec les émissions actuelles pourrait être évaluée seulement dans 10 à 20 ans, par exemple en conduisant une nouvelle étude écologique similaire » [5]. On remercie donc les populations cobayes de bien vouloir se prêter au jeu… Il est déplorable que les conclusions de ce rapport soient si souvent déformées à des fins partisanes, alors même qu’il pointe les limites de la science dans l’évaluation des dangers de l’incinération, ce qui, si la Charte de l’environnement était pleinement appliquée, plaide de toute évidence pour l’application du principe de précaution.

La fin de la mise en décharge des recyclables : un potentiel gâché

Pour clore ce florilège d’approximations, le rapport d’Observ’ER note que le fort potentiel de développement de la filière biogaz « se situe sur les décharges », et déplore que le gisement soit « amené à se réduire inexorablement car, à terme, seuls les déchets ultimes (non valorisables ou non recyclables) y seront stockés ». Très curieux qu’Observ’ER trouve dommage qu’on pense d’abord à la protection des sols et à la valorisation du potentiel des déchets recyclables plutôt qu’à l’enrichissement des exploitants de décharges autoproclamés « producteur d’énergie renouvelable »…

Si vous n’avez en tête que la rentabilité de vos placements dans le secteur des pseudo-énergies « vertes », ce rapport est pour vous ! Par contre, si l’environnement, la santé, la gestion durable des ressources naturelles et le réchauffement climatique font partie de vos préoccupations, le Cniid vous conseille de vous abstenir…


[2p. 56

[3Réduction, Réutilisation/réparation, valorisation matière, valorisation énergétique, élimination

[4p. 58-59

[5Institut de veille sanitaire, Étude d’incidence des cancers à proximité des usines d’incinération d’ordures ménagères, p. 126, 2008

JPEG - 4.3 ko
This will be shown to users with no Flash or Javascript.